En relisant l’Encyclique du Pape Benoit XVI « Sauvés dans l’Espérance » parue en 2007 et en essayant de vivre cette année jubilaire voulue par le Pape François sur « l’Espérance » nous sommes amenés à nous demander : « De quelle espérance sommes-nous les serviteurs ? » Car la question du service dans l’Eglise n’est pas anodine. La réponse que nous lui donnons non plus.

 « Servir, se servir, se faire servir » Là est toute la question !

C’est parce qu’elle lui semblait fondamentale, que le Père Yves Congar a publié en 1963 un ouvrage intitulé : « Pour une Eglise servante et pauvre » L’influence de la réflexion de ce dominicain, grand théologien du XXème siècle, expert à Vatican II, n’est pas étrangère à la prise de conscience des Pères du Concile qui ont voulu édifier une Église « servante et pauvre ». C’est, entre autres, une des raisons essentielles pour laquelle ils ont réactivé le diaconat, comme ministère permanent, à l’intérieur du sacrement de l’ordre, Mais il ne suffit pas de faire des discours sur le service, d’être rempli de bonnes intentions sur les manières de servir, pour que les mentalités, les mauvaises habitudes acquises au cours des siècles disparaissent du jour au lendemain.

Il y a parfois loin de la coupe aux lèvres ! Il y a loin des paroles aux actes. A ceux qui vont devenir évêques, prêtres, diacres, on pourrait légitimement poser la question avant chaque ordination :« qu’espères-tu : servir, te servir, ou te faire servir ? » Question que tout chrétien doit se poser de temps à autre pour faire révision de vie.

Nous sommes évêques, prêtres, diacres, les ministres d’une Eglise qui doit être fidèle à Celui qui lui a donné l’exemple. Il s’est abaissé jusqu’à prendre la place de l’esclave. Bien plus nous dit Saint Paul jusqu’à mourir sur la Croix. Alors quelle espérance servons-nous si elle n’est pas calquée sur celle du Seigneur Jésus. Il a pris la dernière place, quelle est celle que nous ambitionnons plus ou moins secrètement ?

« Venire ut serviam » « Je suis venu pour servir ». Deux ou trois fois par jour, les élèves du petit séminaire Saint François à Blois, en se rendant à la chapelle ou au réfectoire, passaient devant cette devise de leur évêque, Monseigneur Robin. Forcément cela laisse des traces, comme autant de notes semées dans l’inconscient d’une tête d’enfant, d’adolescent…De belles notes d’une musique évangélique. Il ne reste plus qu’à les inscrire sur la portée de sa vie chrétienne !

Mais ceux et celles qui pratiquent le chant choral, savent bien que de temps en temps il y a des fausses notes !

Vous venez d’entendre ce récit archi connu du lavement des pieds dans le chapitre 13 de l’Evangile de Saint Jean.  Laver les pieds des disciples avant de passer à table, était une nécessité à l’époque du Christ dans un pays où, la poussière des chemins aurait souillé les coussins sur lesquels on s’allongeait à demi pour manger.

  Le pauvre Pierre ne comprend plus rien. Son Maître, le Seigneur Jésus, accomplit un geste réservé aux esclaves. Lui-même, n’aurait certainement pas accepté de le faire vis à vis de ses compagnons. Plus que d’un long discours sur le service, c’est d’un exemple qu’il avait besoin pour entrer dans la compréhension du message que Jésus désirait laisser comme testament.  C’est à nous ce soir qui sommes venus célébrer ce Jeudi Saint 2025 qu’il s’adresse.

Il y a mille et une manières de nous mettre au service des autres. Les mœurs du 21ème siècle ne sont plus les mêmes qu’au temps de Jésus,  mais nous aurons assez d’imagination pour trouver notre propre façon de servir.  Cependant évitons si possible d’adopter les attitudes fortement médiatisées des grands de ce monde ou de ceux qui se jugent tel !

 En plus de se faire servir, certains se servent largement. Ne les jugeons pas, plaignons-les plutôt et prions pour leur conversion. C’est, à notre place de baptisés, le meilleur moyen de servir l’espérance chrétienne qui refuse d’enfermer un homme dans ses actes.

Nos Eucharisties seront tronquées tant que nous ne nous mettrons pas, préalablement à nos rassemblements dominicaux, au service de nos frères, avec humilité et discrétion.

 « Comprenez-vous ce que je viens de faire ? C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous » Cette Parole du Christ n’est pas une vague recommandation que nous pourrions facultativement mettre en œuvre ou non. C’est une injonction qui découle de l’amour que nous devons avoir les uns pour les autres.

. Il ne suffit pas de refaire une fois par an, le Jeudi Saint, ce geste hautement symbolique du lavement des pieds, pour que cela soit effectivement la réalité dans nos vies quotidiennes. Or, c’est bien sur l’amour vécu au quotidien avec nos frères et sœurs que nous espérons être jugé par l’Amour.